EDDINGTON — LES SMASHED & LOADED POTATOES DE JOE CROSS

Ari Aster est de ces réalisateurs qui font sensation. Qu’on attend, qu’on redoute, qu’on encense. Il est l’un des nouveaux visages de genre horrifique psychologique et s’est construit sa propre identité filmique. Après Midsommar, Hérédité et Beau is Afraid, le cinéaste dévoilait son nouveau long-métrage au Festival de Cannes… Eddington : un western moderne où tout fout le camp, une critique acerbe des Etats-Unis.

Désormais débarqué dans les salles, l’étrange film qui nous ramène dans la terrifiante année 2020 et l’ère confinement se découvre enfin. Alors, qu’est ce qu’on en retient ?

Le western est un genre fascinant qui raconte tout un monde de l’Amérique. Une affaire de territoire sauvage, de conquête et de rivalité avec des personnages emblématiques (comme les hors la loi ou le shérif – parfois corrompu, parfois dépassé). Il y a dans le western, la récurrence des thèmes de la violence et de la liberté individuelle. Un genre qui, finalement, n’a pas vraiment vieilli et se transpose sans difficulté dans notre époque. Même la plus proche, même la plus étrange.
Est-il trop tôt pour figer l’époque COVID sur la pellicule ? Pas si sûr. C’est le pari tenu par Ari Aster, avec son fameux Eddington.

À Eddington, le shérif Joe Cross est bien décidé à remettre de l’ordre dans ce monde qui part en vrille. Entre les pro et anti tout, les complotistes, les gourous et le reste, c’est un sacré bordel et une montagne de problèmes qui se règlent au vote électoral… ou avec une arme chargée. L’Amérique va mal, et on n’est plus trop certain de pouvoir la sauver.
Pour Joe qui s’étouffe devant ce spectacle affligeant, mais qui n’est sans doute pas plus brillant, on imaginera une recette jouant sur l’accumulation, le trop plein et l’écrasement : des smashed and loaded potatoes qui jonglent avec le gras, le gratiné et l’acidité. Savant mélange !

Ari Aster semble s’amuser avec un miroir déformant pour remodeler l’horreur à sa manière. Il suffirait alors d’observer ce qui se joue autour et de laisser faire, tant l’aberration humaine sait se montrer ingénieuse pour sombrer dans l’absurde. Certes, le scénario pourrait aller plus loin, frapper plus fort, éviter toute retenue, mais le spectacle est là.
Ne nous y trompons pas, Eddington n’est que l’exemple d’un mal plus profond contre lequel nous n’avons visiblement aucune emprise, car il n’y a pas de vaccin, contre la propagation ni la mutation de la bêtise.

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