Ma dernière séance de 2024 était bordelaise et m’emmenait faire un tour sur un autre continent… Oh, Canada!
Si le film de Paul Schrader s’est révélé lors de la compétition cannoise, il aura fallu attendre de longs mois avant de pouvoir le découvrir en salle, avant de parcourir les souvenirs embués d’un cinéaste prêt à se confesser, avant d’être emportée par la justesse du récit, de ses personnages et de sa réalisation.
À votre tour de vous inviter dans le voyage et la mémoire d’une vie.
Oh, Canada! signe le retour de Richard Gere devant les caméras et lui offre sans doute le plus beau rôle de sa carrière. N’en déplaise aux fans de Pretty Woman, l’acteur n’est pas un simple bellâtre qui a connu ses grandes années avec des rôles dans des comédies et films grand public, c’est aussi un comédien engagé qui s’est essayé à des films d’auteur, qui s’est frotté à des scénarios plus complexes et à des personnages de caractère. Avec Terrence Malick pour Les Moissons du Ciel, avec Paul Schrader dans American Gigolo… Oh, Canada! c’est ainsi le retour de Richard, et de son duo avec Paul. Et c’est ensemble qu’ils proposent l’adaptation d’un roman de Russell Banks sur le grand écran.
Leonard Fife est un documentariste reconnu et admiré au Canada. Cet artiste engagé a bâti une carrière, un nom. Mais lorsque ses jours sont comptés, il s’interroge sur l’héritage qu’il laissera et sur l’histoire qui est la sienne. C’est ainsi qu’il acceptera de tourner un film à son sujet pour raconter sa mémoire, ses souvenirs, ses mensonges et ses lâchetés. On s’aventurera alors sur les traces de son passé de jeune-homme, basculant entre les deux mondes, entre les deux âges.
Quelle est la part de vérité dans cette confession filmée ? Quelle image cherche-t-il à fissurer ?
Oh, Canada! propose de découvrir l’ultime interview de Leonard Fife. Loin des scripts dirigés par l’équipe de tournage venue le rencontrer, c’est lui qui décide de la route à emprunter dans les chemins de sa mémoire embuée. C’est lui qui se dévoile avec ses doutes, ses regrets et sa lâcheté. Comme une confession, il fait son acte de rédemption.
Pour faire hommage à la simplicité de l’acte qui cache pourtant plus d’aspérité qu’il n’y parait, on imaginera une recette d’œufs brouillés – comme les souvenirs de l’artiste – avec quelques ingrédients complémentaires qui soulignent l’amertume et la noirceur et bien évidemment… l’appel de la terre de l’érable.
Les œufs brouillés du cinéaste en confession
2 œufs frais comme la version jeune
1 gousse d’ail noir fermenté pour l’amertume et la profondeur
1 bloc de parmesan pour la neige savoureuse – idéale pour donner du goût en rendant hommage à l’âge de la saison hivernale
Un trait de sirop d’érable pour le clin d’œil évident
Une belle tranche de pain à faire passer sur le grill (ou en interview)
Commencez par battre vigoureusement vos œufs avant de les verser dans une poêle généreusement beurrée. Sur feu vif, tournez vivement le mélange pendant quelques courtes minutes pour assurer une brouillade encore baveuse. Faites griller ou toaster votre pain imbibé de sirop d’érable dans du beurre. Parsemez des fragments d’ail noir sur ce dernier avant de renverser vos œufs et de les noyer sous une avalanche de parmesan.
Paul Schrader offre ici un film émouvant et délicat sur un sujet qui l’est tout autant. Oh, Canada! interroge sur les souvenirs véritables ou fantasmés qu’on (se) raconte pour se rappeler qu’on a existé. Dans un jeu de temporalité, on alterne entre la prime jeunesse et l’âge avancé, on voyage et on divague jusqu’à se perdre dans des regrets.
🔍À (re)découvrir : Richard Gere au micro de Telerama pour Oh, Canada! (6min)